Comment as-tu mis en place ton activité de digital nomad ?
Tout a commencé il y a 3 ans, quand j’étais encore dans mon école d’ingénieur (Université Technologique de Compiègne -UTC-). Dans notre cursus, chaque étudiant doit faire un stage de 6 mois en début de quatrième année et un autre à la fin de la cinquième année. J’ai fait mon premier stage en Australie, à Byron Bay, dans une micro-entreprise de services webs (Ostral Pty Ltd). A la fin du stage, le patron m’a proposé de continuer à réaliser quelques missions pour Ostral en tant que freelance, en parallèle de mes études. Ça a été le début de ma carrière de digital nomad, même si je suis retourné en France pour un semestre, dans le sens où j’ai découvert que je pouvais très bien travailler à distance tout en ayant du temps pour profiter de l’endroit où je me trouvais. J’ai pu le confirmer 6 mois plus tard en partant pour un autre échange au Chili tout en continuant mes missions pour Ostral. J’ai complètement accroché à ce mode de vie et j’ai fait mon stage de fin d’études dans l’optique de signer un contrat en télé-travail à la fin.

Quels sont, selon toi, les pour et les contre de ce mode de vie?
Alors, avant tout je préfère préciser que ces pour/contre n’engagent que moi et ma manière d’organiser mon emploi du temps et mon travail. J’ai rencontré quelques autres digital nomads qui répondraient probablement différemment à cette question !
En gros, je me débrouille pour travailler environ 20h par semaine. Avec un salaire de développeur, c’est plus que suffisant pour vivre dans des auberges de jeunesse dans la plupart des pays. Du coup j’ai un joli combo “temps libre – voyage – moyens” qui me fait me sentir en vacances la moitié de l’année. J’ai le temps pour visiter les endroits où je me trouve, faire des activités sur toute une journée (voire plusieurs jours), et ça depuis n’importe où dans le monde (tant qu’il y a au moins la 3G) ! Bref, quand je rentre en France, je me rends bien compte de tout ce qu’il m’est arrivé pendant que mes potes me racontent leurs galères de la vie quotidienne.
Les “contre” sont un peu moins évidents vu de l’extérieur. D’abord, il y a la solitude. Vivant en auberge de jeunesse en permanence, je fais pleins de magnifiques rencontres, des gens avec qui je finis éventuellement par faire un bout de chemin, ou que je revois plus tard au cours d’un autre voyage. Mais ce n’est pas aussi fort qu’un cercle proche d’amis qui vivent à côté les uns des autres et se retrouvent plusieurs fois par semaine. Même constat au niveau du boulot : même si je travaille parfois en équipe, je n’ai pas autant de contact humain avec mes collègues.
L’autre “contre” ne m’est apparu que récemment : je sens que je ne me donne pas à 100% dans mes missions, alors que j’aimerais vraiment m’investir dans certains projets. J’ai parfois envie de me poser quelques part pour travailler à fond et construire quelque chose pour une cause qui me tient à coeur. Je pense que n’importe qui a besoin d’un objectif dans sa vie, et on a tendance à perdre ça de vue quand on se sent en permanence en vacances.

Selon toi, quelles sont les qualités nécessaires pour devenir digital nomad ?
Tout d’abord, il ne faut pas avoir peur des écrans. Particulièrement en tant que développeur. Passer des heures devant des lignes de code, ce n’est pas très glamour. Je pense qu’il faut que le métier en lui-même soit une passion, pas juste une excuse pour pouvoir bouger à travers le monde en même temps. La satisfaction professionnelle joue un aussi grand rôle dans ma vie que mes voyages.
Ensuite il faut être philanthrope. Voyager si on aime pas les gens, ce serait de l’autoflagellation. D’abord parce qu’on passe son temps à rencontrer de nouvelles personnes, et on finit par avoir les mêmes conversations avec pas mal de monde. En fait, on cherche plus le contact humain dans ces discussions, à passer des bons moments avec les autres, qui éventuellement deviennent les souvenirs qu’on garde pour la vie.
Et puis on doit accepter qu’on ne contrôle pas tout, et particulièrement que les meilleures choses arrivent sans qu’on s’y attende. C’est un peu le principe de ce mode de vie : on fait pleins de trucs différents pour multiplier nos chances de vivre des expériences extra-ordinaires. Ce qui m’amène à une autre qualité importante : il faut être chanceux. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai réussi quelque chose sur un malentendu. Par exemple, pour mon stage en Australie, qu’on peut considérer comme le début de l’aventure, j’ai candidaté alors qu’ils avaient déjà trouvé un autre stagiaire. J’avais vu sur internet que le loyer pour une chambre coûtait AUD350, du coup je les ai relancés avec un email prouvant ma motivation en ne demandant que ce salaire. Etonnés, ils m’ont quand même accepté grâce à ça. Ce que je ne savais pas, c’est qu’en Australie les loyers sont hebdomadaires, pas mensuel (pour l’anecdote, je me suis retrouvé à devoir me lever à 5h30 du matin pour nettoyer l’auberge où je restais afin de payer l’hébergement, avant d’enchaîner avec mes journées de stage. Ce n’était pas évident, mais en fin de compte mes 6 mois en Australie ont été les meilleurs de ma vie.) Bref, si j’avais négocié un salaire normal pour vivre là-bas, je n’aurais pas eu le stage, et je ne serais peut-être pas digital nomad aujourd’hui. En anglais, il y a une expression que j’aime bien : “happy-go-lucky”. Personnellement, je considère que tant que tu restes positif, les mauvaises expériences deviennent des histoires marrantes à raconter, et les bonnes des souvenirs pour la vie, donc c’est tout gagnant !

Quels pays as-tu déjà visités ? Quelle est ta prochaine destination ?
Dans l’ordre, je suis allé :
– en Chine, pour un semestre d’échange à Shanghai
– en Australie, pour un stage à Byron Bay
– au Chili, pour un échange, mais pendant deux mois il y avait des grèves dans mon université, du coup je suis allé en Argentine, Pérou et Bolivie (tout en travaillant)
– aux Etats-Unis (Californie), pour un stage de 6 mois
– un peu autour de la France / Europe (tout en travaillant)
– en Afrique du Sud (tout en travaillant)
– à Singapour / Indonésie (tout en travaillant)
– en Guyane (tout en travaillant) : pas recommandé pour les digital nomads, car il y a vraiment zéro connexion là bas !
Prochaine destination: le Canada ! J’ai un pote canadien (rencontré en Afrique du Sud) qui étudie à Montreal et qui m’a invité là-bas !
N’oubliez pas d’écouter notre podcast : Esprit Vagabond, le débat n°4: “Être digital nomad : est-ce fait pour tout le monde ?”